Petite définition : la low tech ou comment vivre avec les moyens du bord.

La low tech s’est développée en opposition au high tech, avec pour objectif de pouvoir subvenir aux besoins quotidiens essentiels, sans avoir recours à des technologies chères et complexes.

LA BATTLE : low tech VS high tech.

Produits simples VS produits premiums

La low tech ne cherche pas à développer des produits sophistiqués (voire superflus), hauts-de-gamme, réservés à une élite. Elle cherche au contraire à démocratiser la réponse à un besoin, en concevant des technologies centrées sur leur fonction de base, sans fioritures et facilement réplicables. Ainsi ont été imaginés un frigidaire sans électricité, une voiture à $2,000 (neuve), une coque de bateau en toile de jute… Autant de produits développés avec des ressources simples à disposition.

Produits bidouillés VS produits parfaits

La low tech se fait vraiment avec les moyens du bord (contrainte matérielle) : la perfection n’est pas recherchée en premier lieu. La low tech cherche d’abord à développer des MVP (Minimum Viable Products). Le Do-It-Yourself fait partie intégrante de la logique de la low tech (esprit makers), qui teste de nombreux prototypes avant de trouver la solution permettant de  répondre au problème initial.

Ingéniosité VS investissements R&D

La low tech repose complètement sur la logique Jugaad*. Littéralement « débrouillardise » en hindi, il s’agit d’une approche d’ « innovation frugale ».

Les entreprises ont tendance, pour innover, à faire appel à une débauche de moyens (+ d’investissements R&D : + de sous ou de nouvelles machines). Au contraire, l’approche Jugaad incite à faire appel à son ingéniosité pour trouver des solutions à partir de ce que l’on a déjà à disposition, sans ressources additionnelles.

Recyclage VS obsolescence programmée

La simplicité des low techs les rend accessibles au plus grand nombre : pas besoin d’être un expert pour comprendre leur fonctionnement ! Il est donc facile de réparer un produit low tech en changeant quelques pièces au lieu de devoir le racheter lorsque l’un des éléments est défaillant. Ainsi, la low tech lutte contre l’obsolescence programmée pour favoriser la durabilité des produits.

CASE STUDY :

Un très bon exemple de low tech est celui de couveuses fabriquées à partir de pièces détachées de Toyota en Afrique de l’Ouest. Le constat était le suivant : des maternités s’étaient fait offrir de superbes couveuses high tech pour leurs hôpitaux. Or, au moment où le premier problème est survenu, les populations locales n’étaientt pas en capacité de les réparer (ils ne savaient pas comment faire et ne pouvaient pas se procurer de pièces de rechange). Les maternités se sont alors progressivement déséquipées… Jusqu’au jour où un ingénieur a pensé à une solution low tech ! Avec l’approche Jugaad, il a regardé quelles étaientles ressources abondantes de la région, que tout le monde savait utiliser. Le résultat est vite apparu : les pièces détachées de Toyota ! La grande majorité de la population a une voiture Toyota sait comment changer les pièces Toyota. Par ailleurs, les vendeurs de pièces Toyota sont très nombreux donc l’approvisionnement est facile… la solution semblait donc toute trouvée ! Ils ont développé ce système de couveuses à base de pièces de voiture Toyota. Cette solution est durable puisque les couveuses sont encore opérationnelles aujourd’hui ! 🙂

Deux drivers sont à l’origine de la low tech.

Enjeu d’accessibilité

La low tech a pour vocation permettre à tout le monde de répondre à des problèmes de base partagés aux quatre coins de la planète (boire de l’eau, faire pousser des aliments, se déplacer, communiquer). L’enjeu de démocratisation de ces solutions à tous les profils (quels que soient leur niveau de richesse / expertise / position géographique) est donc clef.

Enjeu de durabilité des produits

L’émergence du low tech est également due aux problématiques environnementales, en réaction à la consommation de masse qui a épuisé (et continue d’épuiser) de nombreuses ressources. Dans un contexte de crise économique, le besoin de développer des produits peu coûteux et durables est essentiel. La low tech s’est donc développée en réponse à cette problématique.

Pourquoi la société occidentale s’empare-t-elle de la low tech ?

La société occidentale s’intéresse de plus en plus à la low tech puisqu’elle rejoint leurs inspirations et tendances socio-comportementales

Les préoccupations environnementales :

Documentaires, colloques, conférences, sommets internationaux… personne ne peut avoir échappé au fait que la planète est en danger et que les générations futures vont souffrir si nous n’agissons pas maintenant. Ainsi, chacun est sensible aux efforts faits dans le sens de la préservation des ressources et de l’environnement au sens large du terme. Alors que ce n’était pas du tout le cas avant la crise, c’est même devenu socialement valorisant de porter des produits issus de matériaux recyclés (c’est trendy, ça donne une bonne image) ! Le but de la low tech étant d’innover tout en veillant à ce que la production soit la plus respectueuse des ressources à disposition, il est tout à fait logique qu’elle trouve bon accueil dans les sociétés occidentales !

Le culte du laid

Par ailleurs, les canons de beauté esthétiques ne sont pas les seuls produits ayant une place dans l’esprit des consommateurs aujourd’hui. Le contexte économique a rendu les consommateurs plus indulgents. De plus en plus de produits imparfaits, voire laids (e.g. les « légumes moches ») sont achetés. Le côté « non-fini » de la low tech n’est donc pas un souci quant à son acceptation par le public.

La tendance less is more

À l’opposé, il est intéressant de noter que les marques high tech et haut de gamme ont promu un design simple et épuré (exit le rococo !). Il est prestigieux de posséder un produit au design sobre et minimaliste. Les produits low tech étant par définition ultra simples adoptent souvent des apparences en matériaux bruts, qui collent parfaitement aux goûts esthétiques actuels… ça tombe bien !

Et hop, nous vous déposons ici une petite citation inspirante de notre ami Antoine de St Exupéry : « La perfection est atteinte, non pas lorsqu’il n’y a plus rien à  ajouter, mais lorsqu’il n’y a plus rien à  retirer »

La mouvance collaborative

Une des grandes caractéristiques de la low tech est de reposer sur l’intelligence collective. Les notions de partage, de collaboratif et d’open source sont donc centrales dans le concept : les solutions low tech sont souvent issues d’échanges et de confrontation des cultures. Toujours en lien avec le contexte économique de réduction des moyens, la crise a poussé les gens à se serrer les coudes et à inventer des solutions collectives. C’est ainsi que l’économie du partage a vu le jour (Blablacar, Vé’lib, Wikipedia, crowdsourcing…). L’esprit collaboratif de la low tech fait donc écho à des valeurs partagées par la société.

En bref, la low tech

  • … promeut l’innovation…

  • … à base de moyens limités…

  • … en faisant appel à l’ingéniosité…

  • … personnelle et collective…

  • … pour permettre localement…

  • … de répondre à des besoins essentiels…

  • … et ce, durablement !

Les pays émergents, une vraie source d’inspiration.

La France est un pays développé et industrialisé. Dans le confort de nos vies actuelles, il est difficile d’imaginer nos quotidiens sans technologies high tech. Akio Morita disait « Tout le monde peut innover, si sa vie en dépend. ». En effet, face à la nécessité naissent de nouvelles idées. Il est nécessaire d’être ingénieux pour contourner un obstacle, une contrainte. C’est pourquoi de nombreux projets de low tech éclosent dans les pays émergents, qui ont un confort matériel inférieur au nôtre… Et ce n’est que le début de l’histoire ! Ils sont en effet bien partis pour grignoter des parts de marché aux occidentaux ! Nous ferions donc bien de nous inspirer de ces terres prospères en innovation (un peu à la manière du reverse marketing)…

Mon ami Darwin m’a dit que la low tech était la clef de l’avenir.

La low tech permet de concevoir des produits dont la fabrication ne nécessite que de peu de ressources, et dont la durée de vie est longue. S’il arrive un problème environnemental quelconque, la low tech permettra de « survivre » puisque  le concept de la low tech repose justement sur l’adaptation à un contexte donné (répondre à un besoin avec des contraintes de moyens). La low tech sauvera le monde !

*Si vous êtes intéressés par l’approche Jugaad, voici l’ouvrage de référence : L’innovation Jugaad : redevenons ingénieux ! de Simone Ahuja, Jaideep Prabhu et Navi Radjou (édition Diateino)

Quelques projets que nous souhaitons vous partager

Expédition « Les nomades des mers »

Corentin de Chatelperron** et 2 coéquipiers sont partis faire un tour du monde des low techs pendant 3 ans. Au fil de leurs escales, ils ont appris des techniques locales (généralement nées de bidouillage) et se sont enrichis de ces échanges pour s’équiper à bord : eau potable, électricité, etc. Ils sont aussi à l’origine d’un forum de partage sur le low tech pour échanger ou imaginer des solutions low tech utiles et durables ! Pour en savoir plus, c’est ici.

**Corentin de Chatelperron est très intéressé depuis longtemps aux problématiques low tech. Il est en effet à l’origine d’un projet de coque de bateau en toile de jute (ressource abondante et pas cher) pour remplacer les coques classiques en titanium. C’est un exemple parfait de logique push (fabriquer à partir des ressources en profusion) par rapport à la logique pull des industriels (qui se donnent les moyens financiers et technologiques pour construire leur bateau) pour répondre à un même besoin (la construction d’un bateau)

Le Low tech hackathon de Leroy Merlin

Juste pour vous prouver que c’est une tendance montante, nous vous informons que Leroy Merlin a organisé en juin dernier un hackathon de 3 jours, spécialement consacré au low tech ! Nous avons hâte de voir les projets des 70 makers-bricoleurs, qui devaient répondre aux quatre problématiques suivantes : « Comment produire sa propre électricité ? » « Comment stocker de l’énergie ? » « Quel moyen simple pour dessaler l’eau de mer ? » et « Comment conserver les aliments ? ».

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